ACTE TROISIÈME
(Le jardin de Marguerite. A l'arrière
plan, un mur et une petite porte
à gauche, une tonnelle, à droite une
maison avec une fenêtre tout proche
des auditeurs. Des arbres, des arbustes
Siébel entre et s'arrête devant un
parterre de roses et de lis.)
SIÉBEL
Faites-lui mes aveux,
Portez mes voeux !
Fleurs écloses près d'elle,
dites-lui qu'elle est belle,
Que mon coeur nuit et jour
Languit d'amour!
Faites-lui les aveux,
Portez mes voeux!
Révélez à son âme
Le secret de ma flamme,
Qu'il s'exhale avec vous
Parfums plus doux!
(Il cueille une fleur)
Fanée ! hélas ce sorcier, que Dieu damne,
M'a porté malheur!
(Il cueille une autre fleur)
Je ne puis, sans qu'elle se fane
Toucher une fleur!
Si je trempais mes doigts dans l'eau bénite
( Il s'approche de la maison et Il
tempe ses doigts dans un petit bénitier
que se trouve sur le mur.)
C'est là que chaque soir
vient prier Marguerite!
Voyons maintenant! voyons vite!
(Cueillant une autre fleur.)
Elles se fanent?
Non! Satan je ris de toi!
C'est en vous que j'ai foi;
Parlez pour moi!
Qu'elle puisse connaître
L'émoi qu'elle a fait naître,
Et dont mon coeur troublé
N'a point parlé!
C'est en vous que j'ai foi!
Parlez pour moi!
Si l'amour l'effarouche,
Que la fleur sur sa bouche
Sache au moins déposer
Un doux baiser
Un baiser, un doux baiser
(Il cueille unes fleurs pour faire
un bouquet et il s'éloigne par derrière
le parterre du jardin)
Scène et Récitatif
(Méphistophélès et Faust
entrent prudemment.)
FAUST
C'est ici!
MÉPHISTOPHÉLÈS
Suivez-moi?
FAUST
Que regardes-tu là?
MÉPHISTOPHÉLÈS
Siébel, votre rival!
FAUST
Siébel!
MÉPHISTOPHÉLÈS
Chut! Il vient-là!
(Méphistophélès se cache
avec Faust derrière des arbustes.
Siébel retour avec un bouquet
dans le main)
SIÉBEL
( ignorant la présence de
Faust et de Méphistophélès.)
Mon bouquet n'est-il pas charmant ?
MÉPHISTOPHÉLÈS
(se moquant, à part)
Charmant!
SIÉBEL
Victoire! Victoire
Je lui raconterai demain toute l'historie
et, si l'on veut savoir
le secret de mon coeur,
Un baiser lui dira le reste!
(Siébel attache le bouquet
à la porte et s'en va)
MÉPHISTOPHÉLÈS
(se moquant, à part)
Séducteur!
(à Faust)
Attendez-moi là, cher docteur!
Pour tenir compagnie aux fleurs
de votre élève,
Je vais vous chercher un trésor
Plus merveilleux, plus riche encore
Que tous ceux qu'elle voit en rêve!
FAUST
Laisse-moi!
MÉPHISTOPHÉLÈS
J'obéis! Daignez m'attendre ici.
(Il s'en va.)
Cavatine
FAUST
Quel trouble inconnu me pénètre?
Je sens l'amour s'emparer de mon être!
O Marguerite, à tes pieds me voici!
Salut! demeure chaste et pure
Où se devine la présence
D'une âme innocente de divine
Que de richesse en cette pauvreté!
En ce réduit, que de félicité!
O Nature,
C'est là que tu la fis si belle!
C'est là que cette enfant
a dormi sous ton aile,
A grandi sous tes yeux.
Là que ton haleine
Enveloppant son âme?
Tu fis avec amour
Epanouir la femme
En cet ange des cieux!
C'est là! Oui! C'est là!
Salut ! demeure chaste et pure!
Salut ! demeure chaste et pure,
Où se devine la présence
D'une âme innocente et divine!
Scène
MÉPHISTOPHÉLÈS
(de retour, transportant un écrin à bijoux.)
Alerte la voilà!
Si le bouquet l'emporte
Sur l'écrin, je consens à perdre mon pouvoir.
FAUST
Fuyons: je veux ne jamais la revoir.
MÉPHISTOPHÉLÈS
Quel scrupule vous prend?
Sur le seuil de la porte,
Voici l'écrin placé; venez,
j'ai bon espoir.
(Il met l'écrin près des fleurs.
Méphistophélès et Faust se cachent
dans le jardin.)
Scène, Chanson et Air
(Marguerite entre par la petite porte
et vient en silence sur scène.)
MARGUERITE
Je voudrais bien savoir
Quel était ce jeune homme,
Si c'est un grand seigneur.
Et comment il se nomme?
(s'assied son rouet et tout
en filant chante une veille ballade:
chanson du Roi de Thulé.)
Il était un Roi de Thulé,
Qui, jusqu'à la tombe fidèle,
Eut, en souvenir de sa belle,
Une coupe en or ciselé.
Il avait bonne grâce, à ce qu'il m'a semble.
(Reprenant sa chanson.)
Nul trésor n'avait tant de charmes,
Dans les grands jours il s'en servait
Et chaque fois qu'il y buvait
Ses yeux se remplissaient de larmes!
Quand il sentit venir la mort,
Etendu sur sa froide couche
Pour la porter jusqu'à sa bouche,
Sa main fit un suprême effort:
Je ne savais que dire,
et j'ai rougi d'abord.
(Résumant la chanson.)
Et puis, en l'honneur de sa dame
Il but une dernière fois.
La coupe trembla dans ses doigts
Et doucement il rendit l'âme!
Les grands seigneurs ont seuls des airs
si résolus, avec cette douceur!
(Elle range le rouet et elle va à la maison.)
Allons, n'y pensons plus!
Cher Valentin! si Dieux m'écoute,
Je te reverrai!
Me voilà toute seule!
(Aperçoit le bouquet à la porte.)
Un bouquet C'est de Siébel, sans doute!
Pauvre garçon!
(Elle voit le coffret de bijoux.)
Que vois-je là?
D'où ce riche coffret peut-il venir?
Je n'ose y toucher et pourtant
Voici la clef je crois!
Si je l'ouvrais! ma main tremble! Pourquoi?
Je ne fais, en l'ouvrant, rien de mal,
je suppose!
(Elle ouvre le couvercle.)
O Dieu! que de bijoux!
Est-ce un rêve charmant qui m'éblouit,
Ou si je veille?
Mes yeux n'ont jamais vu
De richesse pareille!
(Elle pose l'écrin sur une chaise et
s'agenouille pour regardes les bijoux.
Elle prend les pendants d'oreilles.)
Si j'osais seulement
Me parer un moment
De ces pendants d'oreilles!
Ah ! Voici justement,
Au fond de la cassette,
Un miroir! Comment n'être pas coquette?
(Elle met les pendants d'oreilles
et se regarde dans le miroir.)
Ah! je ris de me voir
Si belle en ce miroir
Est-ce toi, Marguerite, est-ce toi?
Réponds-moi, réponds-moi vite!
Non! non! ce n'est plus toi! non, non
Ce n'est plus ton visage;
C'est la fille d'un roi
Ce n'est plus toi
C'est la fille d'un roi
Qu'on salue au passage!
Ah! s'il était ici!
S'il me voyait ainsi!
Comme une demoiselle
Il me trouverait belle
Comme une demoiselle
Il me trouverait belle
(Elle retourne vers le coffret à bijoux.)
Achevons la métamorphose.
Il me tarde encore d'essayer
Le bracelet et le collier!
(Elle met le bracelet ainsi que
le collier de perles.)
Dieu! c'est comme une main,
Qui sur mon bras se pose!
Ah! je ris de me voir si belle en ce miroir!
Est-ce toi, Marguerite, est-ce toi?
Réponds-moi, réponds-moi,
Réponds, réponds. Réponds vite!
Ah! s'il était ici!
S'il me voyait ainsi,
Comme une demoiselle
Il me trouverait belle
Marguerite, ce n'est plus toi
Ce n'est plus ton visage!
Non! c'est la fille d'un roi
Qu'on salue au passage.
Scène et Quatuor
MARTHE
(entre)
Seigneur Dieu, que vois-je!
comme vous voilà belle, mon ange!
D'où vous vient ce riches écrin?
MARGUERITE
Hélas! On l'aura par mégarde apporté!
MARTHE
Que non pas!
Ces bijoux sont à vous, ma chère demoiselle.
Oui, c'est là le cadeau
d'un Seigneur amoureux!
Mon cher époux jadis était moins généreux!
(Entrent Méphistophélès et Faust)
MÉPHISTOPHÉLÈS
(saluant)
Dame Marthe Schwertlein, si vous plaît?
MARTHE
Qui m'appelle?
Marguerite s'enlève les bijoux et
elle garde-les)
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à Marguerite)
Pardon d'oser ainsi nous présenter chez vous!
(Bas à Faust)
Vous voyez qu'elle a fait bon accueil
aux bijoux!
(A haute voix)
Dame Marthe Schwertlein?
MARTHE
Me voici!
MÉPHISTOPHÉLÈS
La nouvelle que j'apporte
N'est pas pour vous mettre en gaieté.
Votre mari, madame,
Est mort, et vous salue.
MARTHE
Ah! grand Dieu!
(Elle s'évanouit.)
MARGUERITE
Qu'est-ce donc?
MÉPHISTOPHÉLÈS
(réanimant Marthe)
Rien!
MARTHE
O calamité!
O nouvelle imprévue!
MARGUERITE
(à part)
Malgré moi
Mon coeur tremble et tressaille à sa vue!
FAUST
(à part)
La fièvre de mes sens se dissipe à sa vue!
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à Marthe)
Votre mari, Madame,
est mort et vous salue!
MARTHE
(à Méphistophélès)
Ne m'apportez-vous rien de lui ?
MÉPHISTOPHÉLÈS
Rien ! et pour le punir,
il faut dès aujourd'hui
Chercher quelqu'un qui le remplace!
FAUST
(à Marguerite)
Pourquoi donc quitter ces bijoux ?
MARGUERITE
Ces bijoux ne sort pas à moi,
Laissez, laissez de grâce
MÉPHISTOPHÉLÈS
(Affectant un certain empressement,
vis-à-vis de Marthe.)
Qui ne serait heureux
d'échanger avec vous
La bague d'hyménée!
MARTHE
(à part)
Ah! ah!
(à haute voix)
Plaît-il?
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à part)
Hélas ! cruelle destinée!
FAUST
(à Marguerite)
Prenez mon bras un moment!
MARGUERITE
Laissez, je vous en conjure!
MÉPHISTOPHÉLÈS
(offrant son bras à Marthe)
Votre bras
MARTHE
(à part)
Il est charmant!
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à part)
La voisine est un peu mûre
(Marguerite prend le bras de Faust
et ils se promènent dans le jardin.)
MARTHE
Quelle noble allure!
FAUST
Ame douce et pure!
MARTHE
Ainsi, vous voyagez toujours?
MÉPHISTOPHÉLÈS
Toujours!
Dure nécessité, madame Dure nécessité
Sans amis, sans parents, sans femme! Ah!
MARTHE
Cela sied encore aux beaux jours
Mais plus tard, plus tard!
combien il est triste
De vieillir seul, en égoïste
MÉPHISTOPHÉLÈS
J'ai frémi souvent, j'en conviens
Devant cette horrible pensée!
MARTHE
Avant que l'heure en soit passée,
Digne seigneur, songez-y bien
MÉPHISTOPHÉLÈS
J'y songerai!
(Ils marchent ensemble dans le jardin.
Faust et Marguerite reviennent.)
FAUST
Eh quoi! toujours seule?
MARGUERITE
Mon frère est soldat,
J'ai perdu ma mère,
Puis ce fut un autre malheur,
Je perdis ma petite sur!
Pauvre ange! Elle n'était bien chère!
C'était mon unique souci
Que de soins, hélas! que de peines!
C'est quand nos âmes en sont pleines
Que la mort nous les prend ainsi
Sitôt qu'elle s'éveillait
Vite, il fallait que je fusse là!
Elle n'aimait que Marguerite!
Pour la voir, la pauvre petite,
Je reprendrais bien tout cela!
FAUST
Si le ciel, avec un sourire,
L'avait faite semblable à toi,
C'était un ange, un ange!
Oui je le crois!
(Méphistophélès et Marthe reviennent)
MARTHE
(à Méphistophélès)
Vous n'entendez pas
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à Marthe)
Ne m'accusez pas
MARGUERITE
(à Faust)
Vous moquez-vous?
FAUST
Non, non, je t'admire.
MARGUERITE
Je ne vous crois pas!
Je ne vous crois pas!
Et de moi, tout bas,
Vous riez, vous riez sans doute!
J'ai tort de rester
Pour vous écouter
Et pourtant j'écoute
Voici la nuit!
Laissez-moi!
FAUST
Laisse-moi ton bras
Dieu, ne m'a-t-il pas
Conduit sur ta route?
Pour redouter,
Hélas ! redouter,
D'écouter?
Mon coeur parle
Ecoute mon coeur parle
(Marguerite s'écarte de lui et s'en va.
Faust la suit.)
Ah! méchante, on me fuit!
Marguerite!
MARTHE
(à Méphistophélès)
Vous n'entendez pas
Ou de moi tout bas
Vous riez sans doute!
Avant d'écouter
Pourquoi vous hâter
De vous mettre en route
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à Marthe)
Ne m'accusez pas
Si je dois me remettre en route
Faut-il attester
qu'on voudrait rester
quand on vous écoute?
MARGUERITE
Retirez-vous! Voici la nuit!
FAUST
Chère âme!
MARGUERITE
Laissez-moi!
FAUST
Quoi! Méchante On me fuit!
MÉPHISTOPHÉLÈS
(À part)
L'entretien devient trop tendre;
L'entretien devient trop tendre;
esquivons-nous!
(Il se cache derrière un arbre.)
MARTHE
(à part)
Comment m'y prendre?
(à haute voix.)
Eh bien! il est parti Seigneur!
MÉPHISTOPHÉLÈS
Oui cours après moi
MARTHE
Cher Seigneur!
(Elle court après lui.)
MÉPHISTOPHÉLÈS
Ouf! cette vieille impitoyable,
De force ou de gré, je crois,
Allait épouser le diable!
FAUST
(dans la coulisse)
Marguerite!
MARTHE
(dans la coulisse)
Cher seigneur!
MÉPHISTOPHÉLÈS
Serviteur!
Scène
(Siébel ouvre avec précaution la porte
du fond et entre en scène)
SIÉBEL
Du courage! Je veux tout lui dire!
MARTHE
(rentrant en scène)
C'est lui!
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à part)
Non!
MARTHE
Seigneur! Cher seigneur!
SIÉBEL
Plaît-il?
MARTHE
C'est Siébel!
MÉPHISTOPHÉLÈS
(à part)
Oui!
MARTHE
Dans le jardin de Marguerite
que venez-vous chercher à pareille heure?
Allons, bel amoureux, je vous invite
à nous tourner promptement les talons.
SIÉBEL
Mais...
MARTHE
Que diraient les voisins? Allons vite!
Allons, allons, allons,
montrez-moi le chemin!
(À part)
Il sera parti.
MÉPHISTOPHÉLÈS
( à part)
Non
SIÉBEL
Je reviendrai demain.
(Siébel et Marthe sortent)
MÉPHISTOPHÉLÈS
Bonsoir!
Il était temps!
Sous le feuillage sombre
Voici nos amoureux qui reviennent!
C'est bien!
Gardons-nous de troubler
un si doux entretien!
Nuit, étends sur eux ton ombre!
Amour, ferme leur âme
aux remords importuns!
Et vous, fleurs aux subtils parfums,
Epanouissez-vous Sous cette main maudite!
Achevez de troubler le coeur de Marguerite!
(Il disparaît dans l'ombre.)
Duo
(Marguerite revient avec Faust)
MARGUERITE
Il se fait tard, adieu!
FAUST
Quoi! je t'implore en vain!
Attends!
Laisse ta main s'oublier dans la mienne,
(S'agenouille)
Laisse-moi, contempler ton visage
Sous la pâle clarté
Dont l'astre de la nuit,
comme dans un nuage,
Caresse, ta beauté.
MARGUERITE
O silence ô bonheur!
Ineffable mystère!
Enivrante langueur!
J'écoute et je comprends
cette voix solitaire
Qui chante, dans mon coeur!
Laissez un peu, de grâce
(Cueille une marguerite)
FAUST
Qu'est-ce donc?
MARGUERITE
Un simple jeu!
Laissez, laissez un peu!
(effeuillant les pétales d'une fleur)
FAUST
Que dit ta bouche à voix basse?
MARGUERITE
Il m'aime... il ne m'aime pas
Il m'aime... pas... il ne m'aime pas
Il m'aime!
FAUST
Oui,
crois en cette fleur éclose sous tes pas
Qu'elle soit pour ton coeur
L'oracle du ciel même!
Il t'aime!
comprends-tu ce mot sublime et doux?
Aimer!
Porter en nous une ardeur toujours nouvelle!
Nous enivrer sans fin d'une joie éternelle!
MARGUERITE ET FAUST
Eternelle!
FAUST
O nuit d'amour! ciel radieux!
O douces flammes!
Le bonheur silencieux
Verse les cieux, les cieux
Dans nos deux âmes!
MARGUERITE
Je veux t'aimer et te chérir!
Parle encore! Je t'appartiens! Je t'adore!
Pour toi je veux mourir!
Parle, parle encore!
Ah ! je t'adore!
Pour toi je veux mourir
(Elle s'arrache à son étreinte.)
FAUST
Marguerite
MARGUERITE
Ah partez!
FAUST
Marguerite! cruelle
MARGUERITE
Ah partez! Je chancelle!
FAUST
Me séparer de toi! cruelle
MARGUERITE
Laissez-moi!
Ah! partez, partez, oui partez vite
Partez, je tremble, hélas! j'ai peur!
Ne brisez pas le coeur de Marguerite!
FAUST
Tu veux, tu veux que je te quitte!
Vois ma douleur, hélas! vois ma douleur!
Marguerite! tu me brises le coeur!
Par pitié!
MARGUERITE
Si je vous suis chère...
FAUST
Marguerite
MARGUERITE
Par votre amour, par ces aveux
Que je devais taire,
Cédez à ma prière, cédez à mes voeux!
Partez, partez, oui, partez vite!
Partez, je tremble hélas! j'ai peur!
Ne brisez pas le coeur de Marguerite
FAUST
(maîtrisant son émotion)
Divine pureté!
Chaste innocence,
Dont la puissance
Triomphe de ma volonté!
J'obéis! mais demain
MARGUERITE
Oui, demain, dès l'aurore,
demain, toujours!
FAUST
Un mot encore!
Répète-moi ce doux aveu!
Tu m'aimes?
MARGUERITE
Adieu!
(Marguerite va vers la maison en
toute hâte, elle s'arrête un instant
sur le seuil de la porte et envoie
un baiser à Faust.)
FAUST
Félicité du ciel!
Ah ! fuyons!
(Il se dirige vers la porte du jardin.
Méphistophélès lui barre le chemin.)
MÉPHISTOPHÉLÈS
Tête folle!
FAUST
Tu nous écoutais?
MÉPHISTOPHÉLÈS
Par bonheur!
Vous auriez grand besoin, docteur,
Qu'on vous renvoyât à l'école!
FAUST
Laisse-moi!
MÉPHISTOPHÉLÈS
Daignez seulement écouter un moment,
Ce qu'elle va conter aux étoiles,
Cher maître!
(Marguerite ouvre sa fenêtre.)
Tenez!
Elle ouvre sa fenêtre.
MARGUERITE
Il m'aime! il m'aime!
Quel trouble en mon coeur!
L'oiseau chante,
Le vent murmure!
Toutes les voix de nature
Me redisent en choeur
"Il t'aime!"
Ah! qu'il est doux de vivre!
Le ciel me sourit;
L'air m'enivre Est-ce de plaisir et d'amour
Que la feuille tremble et palpite?
Demain! ah!
presse ton retour, cher bien-aimé!
Viens!
FAUST
(se précipitant à la fenêtre)
Marguerite!
(Elle se donne à l'étreinte de Faust)
MARGUERITE
Ah!
(Méphistophélès sarcastique rit bruyamment
tout en quittant le jardin.)
MÉPHISTOPHÉLÈS
Hein! Hein! Hein! Hein! Hein!
|
ACTO TERCERO
(El jardín de margarita. Al fondo,
un muro con una pequeña puerta.
A la izquierda, unos arbustos. A la derecha,
un pabellón cuya ventana se halla de cara
al público. Árboles y macizos...
Siebel solo, está junto
a un macizo de rosas y lilas)
SIEBEL
Confesaos por mí,
transmitidle mis ruegos,
flores abiertas junto a ella,
decidle que es hermosa.
¡Que mi corazón noche y día
languidece de amor!
Confesaos por mí,
transmitidle mis ruegos.
¡Revelad a su alma
el secreto de mi ardor!
¡Qué exhale con vosotras
los más dulces perfumes!
(coge una flor)
¡Marchita! ¡Ay! ¡Ese mago, que Dios maldiga,
me ha traído mala suerte!
(coge otra flor)
¡No puedo tocar una flor
sin que se marchite!
Si mojase mis dedos en agua bendita
(Se acerca al pabellón y humedece sus
dedos en una pila de agua bendita
adosada al muro)
¡Aquí es donde Margarita
viene cada tarde a rezar!
¡Veamos ahora! ¡Rápido, veamos!
(coge dos o tres flores)
¿Se marchitan?... ¡No!
¡Satanás, me río de ti!
Tengo fe en vosotras;
¡hablad por mí!
¡Que ella pueda conocer
el ardor que ha hecho nacer,
y del que mi turbado corazón
no ha osado hablar!
Tengo fe en vosotras;
¡hablad por mí!
¡Si el amor le asusta,
que la flor sobre su boca
sepa al menos depositar
un dulce beso!
Un beso, un dulce beso...
(Coge unas flores para formar un
ramillete y desaparece tras los macizos
del jardín)
Escena y Recitativo
(Fausto y Mefistófeles entran
lentamente en escena.)
FAUSTO
¿Es aquí?
MEFISTÓFELES
¡Sígueme!
FAUSTO
¿Qué estás mirando?
MEFISTÓFELES
A Siebel, tu rival.
FAUSTO
¡Siebel!
MEFISTÓFELES
¡Chitón! ¡Ahí viene!
(Mefistófeles se oculta con Fausto
detrás de unos arbustos. Siebel
vuelve a escena con un ramillete
en la mano)
SIEBEL
(ignorando la presencia de
Fausto y Mefistófeles)
¿No es encantador mi ramillete?
MEFISTÓFELES
(burlándose, para sí)
¡Encantador!
SIEBEL
¡Victoria! Victoria...
Mañana le contaré toda la historia;
y si quiere conocer
el secreto de mi corazón,
¡un beso le dirá el resto!
(Siebel coloca el ramillete en la
puerta del pabellón y sale.)
MEFISTÓFELES
(burlándose, para sí)
¡Seductor!
(A Fausto)
¡Espérame aquí, querido doctor!
¡Para acompañar a las flores
de vuestro alumno,
voy a buscaros un tesoro
más maravilloso, más rico todavía
que todos los que ella ve en sueños!
FAUSTO
¡Déjame!
MEFISTÓFELES
¡Obedezco! Dígnate esperarme aquí.
(Sale)
Cavatina
FAUSTO
¡Qué desconocida turbación me invade!
Siento que el amor se apodera de mí.
¡Oh, Margarita! ¡Heme aquí a tus pies!
¡Salud! ¡Morada casta y pura...
donde se adivina la presencia
de un alma inocente y divina!
¡Cuánta riqueza en esta pobreza!
¡Cuánta felicidad en esta fortaleza!
¡Oh, naturaleza,
aquí la hiciste tan hermosa!
¡Aquí esta niña
ha dormido bajo tus alas,
ha crecido bajo tus ojos!
¡Aquí donde, envolviendo
con tu aliento su alma,
has convertido con tu amor
a la mujer
en este ángel del cielo!
¡Es aquí! ¡Sí! ¡Es aquí!
¡Salud! ¡Morada casta y pura,
¡Salud! ¡Morada casta y pura,
donde se adivina la presencia
de un alma inocente y divina!...
Escena
MEFISTÓFELES
(Regresa con un joyero bajo el brazo.)
¡Alerta! ¡Hela aquí!
Si prefiere el ramillete al joyero,
consideraré que estoy perdiendo poder.
FAUSTO
¡Huyamos! ¡No quiero volver a verla!
MEFISTÓFELES
¿Qué escrúpulos te asaltan?
En el umbral de la puerta,
¡he aquí el joyero! ¡Venid!
¡Tengo grandes esperanzas!
(Coloca el joyero cerca de las flores.
Arrastra a Fausto y desaparece con él
en el jardín.)
Escena, Canción y Aria.
(Margarita entra por la puerta pequeña
y permanece en silencio sobre la escena)
MARGARITA
Me gustaría saber
quién era aquel joven,
si es un gran señor,
y cómo se llama.
(se sienta ante su rueca, y mientras
hila canta una vieja balada:
la canción del rey de Thule)
"Érase una vez un rey de Thule
que, fiel hasta la tumba,
conservó, en recuerdo de su amada,
una copa de oro cincelada .."
Tenía buenos modales, al parecer.
(Continuando con la canción)
"¡Ningún tesoro poseía ya encanto!
¡La utilizaba en los días importantes,
y cada vez que de ella bebía,
sus ojos se llenaban de lágrimas.
Cuando sintió llegar la muerte,
tendido sobre su frío lecho,
para llevársela a la boca
hizo su mano un supremo esfuerzo..."
Yo no he sabido qué decir,
y desde luego me he sonrojado.
(Resumiendo la canción)
"Y luego, en honor de su dama,
bebió por última vez;
¡la copa tembló entre sus dedos,
y dulcemente entregó su alma!"
¡Sólo los grandes señores actúan de forma
tan resuelta, con tanta dulzura!
(Aparta la rueca y se dirige al pabellón)
¡Venga! ¡No pensemos más en ello!
¡Querido Valentín, si Dios me escucha,
volveré a verte!
¡Aquí estoy completamente sola!
(ve el ramillete colgado de la puerta.)
¡Un ramo!
¡Es de Siebel, sin duda! ¡Pobre muchacho!
(ve el joyero)
¿Qué veo?
¿De dónde sale ese rico cofrecillo?
No me atrevo a tocarlo, y sin embargo...
¡Creo que ésta es la llave!
¿Y si lo abriera? ¡Mi mano tiembla! ¿Por qué?
¡Abriéndolo, no hago nada malo!...
Supongo
(abre el joyero)
¡Dios mío! ¡Cuántas joyas!
¿Se trata de un sueño lo que me deslumbra,
o estoy despierta?
¡Mi ojos no han visto jamás
riquezas semejantes!
(Dja el joyero sobre una silla y
se arrodilla para mirar las joyas.
Coge unos pendientes)
¡Si tan sólo me atreviera
a probarme un instante
estos pendientes!
¡Ah! ¡Precisamente aquí hay,
en el fondo del cofre,
un espejo! ¿Cómo no ser coqueta?
(Margarita se prueba los pendientes
y se mira en el espejo.)
¡Ah, me río al verme
tan hermosa en este espejo!
¿Eres tú, Margarita, eres tú?
¡Respóndeme, responde rápido!
¡No! ¡No! ¡No eres tú!... no... no
¡No es ése tu rostro!
Es la hija de un rey...
No eres tú..
¡Es la hija de un rey,
a la que se saluda al pasar!
¡Ah! ¡Si él estuviera aquí!
¡Si me viera así!
¡Me encontraría bella
como a una damisela!
Como una damisela
me encontraría bella...
(Se vuelve hacia el joyero)
¡Terminemos la metamorfosis!
Me falta todavía probarme
la pulsera y el collar.
(se prueba el collar de perlas
y la pulsera)
¡Dios mío! ¡Es como si una mano
se posara sobre mí!
¡Me río al verme tan hermosa en este espejo!
¿Eres tú, Margarita, eres tú?
¡Respóndeme, responde rápido!
Responde, responde. ¡Responde rápido!
¡Ah! ¡Si él estuviera aquí!
¡Si me viera así!
¡Me encontraría bella
como a una damisela!
Margarita, no eres tú
¡ese no es tu rostro!
¡No! ¡Es la hija de un rey,
a la que se saluda al pasar!
Escena y Cuarteto
MARTA
(entrando)
Dios mío, ¿qué veo?
¡Qué bella estás, ángel mío!
¿De dónde has sacado ese rico joyero?
MARGARITA
¡Ay! ¡Lo han debido de dejar aquí por error!
MARTA
¡Qué va!
¡Estas joyas son para ti, mi querida damisela!
¡Sí! ¡Se trata de un regalo
de un hombre enamorado!
¡Mi querido esposo fue otrora menos generoso!
(Entran en escena Mefistófeles y Fausto.)
MEFISTÓFELES
(saludando)
¿La Señora Marta Schwerdtlein, por favor?
MARTA
¿Quién me llama?
(Margarita se quita las joyas y
vuelve a guardarlas.)
MEFISTÓFELES
(A Margarita)
¡Perdonad por atrevemos a presentamos así!
(en voz baja a Fausto)
¿Ves que buena acogida ha dispensado
a las joyas?
(en voz alta)
¿La señora Marta Schwerdtlein?
MARTA
¡Soy yo!
MEFISTÓFELES
La noticia que os traigo
no es para alegraros.
¡Vuestro marido, señora,
ha muerto y os manda saludos!
MARTA
¡Ah! ¡Dios mío!
(Ella se desvanece)
MARGARITA
¿Qué ha ocurrido?
MEFISTÓFELES
(reanimando a Marta)
¡Nada!
MARTA
¡Ay, qué calamidad!
¡Ay, qué noticia tan inesperada!
MARGARITA
(para sí)
A pesar mío,
mi corazón tiembla y tiembla ante su mirada.
FAUSTO
(para sí)
¡Mis sentidos se desvanecen ante su vista!
MEFISTÓFELES
(A Marta)
¡Vuestro marido, señora,
ha muerto y os manda saludos!
MARTA
(a Mefistófeles)
¿No me traéis nada suyo?
MEFISTÓFELES
¡Nada! ¡Y, para castigarle,
es necesario que a partir de hoy
busquéis a alguien que le reemplace!
FAUSTO
(a Margarita)
¿Por qué os quitáis estas joyas?
MARGARITA
¡Estas joyas no son mías!
Dejadme, dejadme por favor...
MEFISTÓFELES
(Con una cierta diligencia
frente a Marta)
¿Quién no se sentiría feliz
de intercambiar con vos
la sortija del himeneo?
MARTA
(para sí)
¡Ah, bah!
(En voz alta)
¿Decíais?
MEFISTÓFELES
(para sí)
¡Ay! ¡Destino cruel!
FAUSTO
(A Margarita)
¡Apoyaos un instante en mi brazo!
MARGARITA
¡Dejadme! ¡Os lo suplico!
MEFISTÓFELES
(ofreciendo su brazo a Marta)
¡Vuestro brazo!
MARTA
(para sí)
¡Es encantador!
MEFISTÓFELES
(para sí)
¡La vecina está algo madura!
(Margarita acepta el brazo de Fausto
y se aleja con él por el jardín.)
MARTA
¡Qué noble porte!
FAUSTO
¡Alma dulce y pura!
MARTA
¿Así que siempre estáis de viaje?
MEFISTÓFELES
¡Siempre!
¡Dura necesidad, señora!.. Dura necesidad...
¡Sin amigos, sin familia, sin esposa! ¡Ah!
MARTA
¡Eso va bien en los años mozos!
Pero más tarde,
¡qué triste es
envejecer solo, y egoísta!
MEFISTOFELES
¡Tiemblo a menudo, lo confieso,
ante tan horrible pensamiento!
MARTA
Antes de que se os pase el momento,
digno señor, pensadlo bien.
MEFISTÓFELES
¡Lo pensaré!...
(Ellos salen juntos.
Entran Fausto y Margarita.)
FAUSTO
¡Y bien! ¿Siempre sola?
MARGARITA
Mi hermano es soldado;
perdí a mi madre;
después vino otra desgracia,
¡perdí a mi hermana pequeña!
¡Pobre ángel! ¡La quería tanto!
Era mi única preocupación.
¡Cuántos cuidados, ay! ¡Cuántas penas!
¡Cuando nuestras almas están en su plenitud
se las lleva la muerte!
¡En cuanto se despertaba,
yo tenía que estar a su lado!
¡Ella sólo quería a Margarita!
¡Por ver a la pobre pequeña,
lo aceptaría todo de nuevo!
FAUSTO
Si el cielo, con una sonrisa,
la hizo semejante a ti,
¡era un ángel!
¡Sí, lo creo!
(Vuelve Mefistófeles y Marta)
MARTA
(a Mefistófeles)
Vos no me comprendéis,
MEFISTÓFELES
(a Marta)
No me acuséis,
MARGARITA
(a Fausto)
¿Os burláis de mí?
FAUSTO
No, ¡te admiro!
MARGARITA
¡No os creo,!
¡No os creo!
¡y de mí, en voz baja,
os reís, os reís sin duda!
¡Hago mal en quedarme
a escucharos!
¡Y, sin embargo, os escucho!
¡Llega la noche!
¡Dejadme!
FAUSTO
¡Dame tu brazo!
¿No me ha puesto Dios
en tu camino?...
¿Por qué tienes miedo,
ay, de escuchar?
escuchar?
Mi corazón habla;
escúchalo... mi corazón habla...
(Margarita se aleja de él y se va.
Fausto la sigue)
¡Ah! Malvada, me huyes!
¡Margarita!
MARTA
(a Mefistófeles)
Vos no me comprendéis,
¡o de mí, en voz baja,
os reís sin duda!
Antes de escuchar,
¿por qué tenéis prisa
por poneros en camino?
MEFISTÓFELES
(a Marta)
No me acuséis,
de que deba, ay, ponerme en camino.
¿Debo demostrar
que preferiría quedarme
cuando os escucho?
MARGARITA
¡Marchaos! Llega la noche.
FAUSTO
¡Alma querida!
MARGARITA
¡Dejadme!
FAUSTO
¡Ah! ¡Cruel! ¡Huyes!
MEFISTÓFELES
(para sí)
¡La conversación se pone demasiado tierna!
La conversación se pone demasiado tierna;
¡Esquivémosla!
(Mefistófeles se esconde detrás de un árbol.)
MARTA
(para sí)
¿Qué debo hacer?
(En voz alta)
¡Y bien! ¡Se ha marchado! ¡Señor!
MEFISTÓFELES
¡Sí!... ¡Corre tras de mí!
MARTA
¡Querido señor!
(Ella corre tras él)
MEFISTÓFELES
¡Uf! ¡Esta vieja despiadada,
por las buenas o por las malas, creo
que se iba a casar con el diablo!
FAUSTO
(entre bastidores)
¡Margarita!
MARTA
(entre bastidores)
¡Querido señor!
MEFISTÓFELES
¡Servidor!
Escena
(Siebel abre con precaución la puerta
del fondo y entra en escena)
SIEBEL
¡Coraje! ¡Quiero decírselo todo!
MARTA
(entrando en escena)
¡Es él!
MEFISTÓFELES
(para sí)
¡No!
MARTA
¡Señor! ¡Querido señor!
SIEBEL
¿Cómo?
MARTA
¡Es Siebel!
MEFISTÓFELES
(para sí)
¡Sí!
MARTA
En el jardín de Margarita,
¿qué venís a buscar a estas horas?
Vamos, guapo enamorado, os invito
a girar sobre vuestros talones.
SIEBEL
Pero...
MARTA
¿Qué dirían los vecinos?
¡Vamos rápido!
¡Vamos, vamos, vamos, mostradme el camino!
(Para sí)
Se habrá marchado.
MEFISTÓFELES
(para sí)
No.
SIEBEL
Volveré mañana.
(Siebel y Marta salen)
MEFISTÓFELES
¡Buenas noches!
¡Ya era hora!
¡Bajo el oscuro follaje
vuelven ya nuestros amantes!
¡Muy bien!
¡Guardémonos de turbar
tan dulce entrevista!
¡Oh noche, extiende sobre ellos tu sombra!
¡Amor, cierra su alma
a remordimientos inoportunos!
¡Y vosotras, flores de sutiles perfumes,
abriros bajo esta mano maldita!
¡Acabad de turbar el corazón de Margarita!
(Se aleja y desaparece en la oscuridad)
Dúo
(Entran Fausto y Margarita.)
MARGARITA
¡Se hace tarde! ¡Adiós!
FAUSTO
¡Qué! ¡Te imploro en vano!
¡Espera!
¡Deja tu mano olvidada en la mía!
(se arrodilla)
¡Déjame, déjame contemplar tu rostro
a la pálida luz
con la que el astro de la noche,
como si fuera una nube,
acaricia tu belleza!
MARGARITA
¡Oh, silencio! ¡Oh, dicha!
¡Misterio inefable!
¡Embriagadora languidez!
¡Escucho y comprendo
esa voz solitaria
que canta en mi corazón!
¡Dejadme un poco, os lo ruego!
(Se inclina y coge una margarita.)
FAUSTO
¿Qué haces?
MARGARITA
¡Un simple juego!
¡Dejadme hacer!
(Deshoja la margarita.)
FAUSTO
¿Qué murmura tu boca en voz baja?
MARGARITA
Me ama... No me ama
Me ama... no... ¡No me ama!
¡Me ama!
FAUSTO
¡Sí!
¡Cree en esta flor que se ha abierto a tus pies!
¡Que sea para tu corazón
el oráculo del mismo cielo!
¡Él te ama!
¿Comprendes esta palabra sublime y dulce?
¡Amar!
¡Llevar en nosotros un ardor siempre nuevo!
¡Embriagarnos sin fin en una alegría eterna!
FAUSTO Y MARGARITA
¡Eterna!
FAUSTO
¡Oh, noche de amor! ¡Cielo radiante!
¡Oh, dulces llamaradas!
¡La dicha silenciosa
vierte el cielo, el cielo
en nuestras dos almas!
MARGARITA
¡Quiero amarte y quererte!
¡Sigue hablando! ¡Te pertenezco! ¡Te adoro!
¡Quiero morir por ti!
¡Habla... sigue hablando!...
¡Ah! ¡Te adoro!
¡Quiero morir por ti!
(Ella se suelta de su abrazo)
FAUSTO
¡Margarita!
MARGARITA
¡Ah! ¡Marchaos!
FAUSTO
¡Margarita! ¡Cruel!
MARGARITA
¡Ah! ¡Marchaos! ¡Vacilo!
FAUSTO
¡Separarme de ti! ¡Cruel!
MARGARITA
¡Dejadme!
¡Ah! Marchaos, marchaos, ¡Sí, marchaos deprisa!...
Marchaos, ¡Tiemblo! ¡Ay! ¡Tengo miedo!
¡No rompáis el corazón de Margarita!
FAUSTO
¡Quieres que me marche!
¡Contempla mi dolor!
¡Margarita! ¡Me partes el corazón!
¡Por piedad!
MARGARITA
Si en verdad me queréis...
FAUSTO
¡Margarita!
MARGARITA
Por vuestro amor, por estas confesiones,
que debiera callarme,
¡ceded a mis súplicas! ¡Ceded a mis ruegos!
Marchaos, marchaos, ¡Sí, marchaos deprisa!...
Marchaos, ¡Tiemblo! ¡Ay! ¡Tengo miedo!
¡No rompáis el corazón de Margarita!...
FAUSTO
(dominando su emoción)
¡Divina pureza!
¡Casta inocencia,
cuyo poder
triunfa sobre mi voluntad!
¡Yo obedezco!... ¡Pero mañana!...
MARGARITA
¡Sí, mañana! ¡Desde la aurora!
¡Mañana!... ¡Siempre!
FAUSTO
¡Una palabra aún!
¡Repíteme esa dulce confesión!
¿Me amas?
MARGARITA
¡Adiós!
(Corre hacia el pabellón se detiene
un instante en el umbral
y envía un beso a Fausto.
Entra en el pabellón.)
FAUSTO
¡Felicidad celestial!
¡Ah! ¡Huyamos!
(Se lanza hacia la puerta del jardín.
Mefistófeles le cierra el paso.)
MEFISTÓFELES
¡Cabeza loca!
FAUSTO
Estabas escuchando.
MEFISTÓFELES
¡Por suerte!
¡Tendríais gran necesidad, doctor,
de volver a la escuela!
FAUSTO
¡Dejadme!
MEFISTÓFELES
Dignaos solamente escuchar un momento
lo que ella va a contarle a las estrellas,
querido maestro.
(Margarita abre la ventana del pabellón)
¡Mirad!
¡Abre la ventanal
MARGARITA
¡Me ama! ¡Me ama!
¡Qué turbación en mi corazón!
¡El pájaro canta!
¡El viento murmura!
Todas las voces de la naturaleza
me repiten a coro:
"¡Él te ama!"
¡Ah! ¡Qué dulce es la vida!
¡El cielo me sonríe,
el aire me embriaga! ¿Tiembla y palpita la hoja
de placer y de amor?
¿Mañana? ¡Ah!
¡Apresúrate a regresar, querido amor!
¡Ven!
FAUSTO
(Se lanza hacia la ventana)
¡Margarita!
(Ella se abraza a Fausto.)
MARGARITA
¡Ah!
(Mefistófeles sarcástico ríe ruidosamente
dejando el jardín)
MEFISTÓFELES
¡Ja! ¡Ja! ¡Ja! ¡Ja! ¡Ja!
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